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Raphaël GANON
La première fois que j’ai lu le nom de Raphaël Ganon, c’était le 5 janvier 2017 aux archives départementales sur un PV d’arrestation…
Dans la classe salle 21, nous étions 12, j’étais assise seule au bout de la classe concentrée sur mon écriture, sur une liste de plusieurs prénoms j’ai choisi celui-ci car je le trouvais très joli.
La ville de Rouen je la connais depuis 17 ans. J’y habite je sais qu’il habitait 41 rue Victor Hugo, tout près de la place Saint Marc, j’y suis allée souvent. Il a été arrêté le 6 mai 1942 puis interné à Drancy.
Je sais, grâce au livre de Françoise Bottois, que la police française est venue une première fois au domicile de Raphaël Ganon mais qu’il s’était caché dans le grenier. Lors du deuxième passage de la police française Raphaël est descendu du grenier pour venir en aide à sa femme car il a entendu que s’il ne se rendait pas sa femme serait arrêtée à sa place. Il était donc 23h30 quand Raphaël est arrêté.
Je sais par des recherches effectuées le 27 avril 2017 que sa femme Linda Ganon née le 17/10/1878 à Aïdin en Turquie (décédée à la gare du Bourget) et son fils Léoto Ganon né le 18/12/1913 à Aïdin en Turquie (interné à Drancy et déporté à Auschwitz par le convoi N°47 et assassiné) ont été arrêtés le 15 et 17 janvier 1943.
Je me demande ce qu’il pensait pendant les trajets, avait-il peur ?
Je ne sais pas. Ensuite il a été déporté par le convoi N°39 à Auschwitz. Qu’a-t-il pensé ? A-t-il eu le temps de se préparer ? Ou bien d’emmener des provisions ? Pensait-il aller travailler ?
Sa rue, la rue Victor Hugo, j’y suis passé une seule fois… arrivée devant le numéro 41 c’était une grande porte d’une couleur gris très foncé, le tour de cette porte était plein de motifs et ces motifs représentaient une vigne. La façade de l’immeuble est très sale et abimée aujourd’hui. Comment était-il en 1942 ?
En début d’année je ne savais rien de tout cela, j’ai appris tellement de choses….
Je sais qu’il est arrivé à Auschwitz en septembre 1942. Je sais qu’il a été à Drancy puis à Pithiviers pour ensuite retourner à Drancy pour finir son chemin à Auschwitz.
Pourquoi l’ont-ils emmené à Pithiviers pour le ramener à Drancy alors qu’il y était déjà ?
Quand est-il mort ? Ça, je ne le saurais jamais, cela restera son secret ! Je sais juste qu’il a été déporté par le convoi N°39 le 30 septembre 1942.
Son nom figure sur le mur de la synagogue de Rouen, je suis allée avec ma classe dans Rouen pour nous rendre aux adresses des déportés de 1942 qui habitaient dans cette ville. Quand je suis arrivée devant chez Raphaël Ganon je me suis demandé : comment vivait-il, bien ou mal ? Qu’a-t-il pensé ? Quel fût son ressenti ? A-t-il eu peur ou s’y attendait-il ? Je n’aurai jamais de réponse à toutes ces questions !
Je sais qu’il s’était fait recenser en octobre 1940, Raphaël Ganon est né le 17 mars 1900 à Smyrna en Turquie et lors de son recensement Raphael avait 42 ans son métier était commerçant.
Raphael était-il proche de sa famille ? Ses parents étaient-il toujours en Turquie ? Je ne sais pas…
Je me demande si Raphael Ganon connaissait quelqu’un au moment de son convoi ? Avait-il des amis ? Etait-il solitaire ?
Son histoire restera secrète…
Mais d’avoir étudié une partie de sa vie m’incite à en parler autour de moi ; car cela doit être su par tout le monde et je dois dire que l’histoire en 1942 ne doit plus se reproduire.
Clarisse
M. Jean-Jacques GANON est responsable de la filière restauration à l'IFA Marcel Sauvage et nous avons appris peu avant la restitution qu'il était le neveu de Raphaël GANON. Il nous a gentiment communiqué une photographie personnelle, nous autorisant à la publier. Merci à lui.
Raphaël GANON se trouve au centre à côté de sa femme Linda et de ses deux filles Paulette et Gaby.